"L'Haïtien est né déplacé. Déplacé il demeure. Et ne peut craindre ou rêver que de nouveaux transferts, de migrations forcées ou mythiques".
Christophe Wargny, Haïti n'existe pas, autrement Frontières, 2010.

vendredi 6 mai 2011

Plaidoyer sur l'état civil

Bonjour à tous!

Après l'immersion culturelle, un peu d'immersion dans la travail.
Mercredi et Jeudi s'est tenue une réunion du groupe de travail inter-organisationnel sur la documentation. C'est un groupe qui s'est formé il y a peu de temps et qui souhaite monter une campagne de plaidoyer à l'intention du nouveau gouvernement sur la question de l'état civil. Ce groupe est composé de diverses organisations internationales (Nations Unies) comme l'UNICEF, le Haut Commissariat aux Réfugiés des NU, le UNFPA, la Minustah, Cluster protection ainsi que des associations haïtiennes qui travaillent sur les questions d'état civil comme le GARR. Comme je suis amenée à travailler sur les problèmes de l'état civil, les responsables du GARR ont accepté que j'assiste à cette réunion.

L'objectif des ces deux jours de réunion était de mener une réflexion sur les objectifs du plaidoyer, ses cibles ainsi que les messages clés à faire passer pendant la campagne. Il nous fallait aussi réfléchir aux moyens à mettre en oeuvre pour cette campagne ainsi qu'un agenda.

La première matinée était consacrée à la présentation du sytème d'état civil, de ses failles et des raisons qui font que ses failles existent et pour lesquelles les dirigeants du pays n'ont jamais vraiment cherché à moderniser le système. Tous les acteurs présents n'étant pas des spécialistes du système il était important de bien reprendre ces points et de faire comprendre les enjeux de la réforme de l'état civil.
L'après-midi a été consacrée à une réflexion en petits groupes, composés des représentants des divers acteurs présents. Cette réflexion avait pour but de dégager les messages importants en matière d'état civil. Nous avons donc identifié les problèmes qui se posaient et quelles pouvaient être les solutions, à plusieurs termes, pour parvenir à résoudre ces problèmes.

Après une restitution en groupe plenier nous avons réussi à dégager trois axes de travail de plaidoyer:
- la sensibilisation :
                   - de la population à l'importance de l'état civil
                   - mais aussi des différents acteurs publiques qui interviennent dans le processus de l'état civil: les ministères, les consulats haïtiens, les autorités locales, les parlementaires...

- la réforme légale du sytème d'état civil: le processus tel que prévu aujourd'hui par les textes est beaucoup trop compliqué et il a besoin d'être simplifié et modernisé et aussi de tenir plus compte de la spécificité de la famille haïtienne. Par ailleurs, une réforme du statut et du fonctionnement des bureaux d'état civil est indispensable.

- la réforme institutionnelle: il y a aujourd'hui beaucoup trop d'acteurs publiques impliqués dans la procédure d'état civil. Ceci multiplie les interlocuteurs et les responsables ce qui rend le système complètement opaque pour la population. Il s'est également dégagé l'idée qu'il fallait garantir l'authenticité des actes, notamment en passant par une informatisation du système.

Le lendemain matin, nous avons discuté en groupe plenier afin de valider de manière définitive ces grands axes. Puis nous avons repris le travail en petits groupes en prenant chaucun un des axes pour réfléchir plus en avant aux cibles des messages, au contenu des messages et aux moyens pour les faire passer. Tout ce travail a donné lieu à une restitution en groupe après le déjeuner.

Je dois avouer que j'ai trouvé le travail de ces deux journées vraiment efficace. Nous avons réussi à respecter un timing assez serré, avec des discussions vraiment constructives. Je ne pensais pas que nous arriverions à ce résultat, notamment à cause des divers acteurs et intérêts en présence.

Ces deux jours ont été vraiment très instructifs pour moi, m'ont donné un aperçu du travail inter-organisationnel en Haïti, qui implique nécessairement des acteurs internationaux, ce qui est nouveau pour moi.

Pour les suites de cet atelier et la campagne de plaidoyer, j'émets quelques réserves. Il ne me semble pas possible d'agir vraiment comme un groupe dans la mesure où les techniques de plaidoyer d'ONG nationales n'ont absolument rien à voir avec celles des organisations internationales qui ont des rapports totalement différents avec le gouvernement. Mais je pense que le principal est que même si nous ne pouvons mener l'action tous ensemble, au moins,  nous avons dégagé ensemble les points essentiels de la campagne et si chaque acteur se concentre uniquement sur ces points communément acceptés, nous devrions pouvoir parvenir à un travail constructif!

Nous verrons ce que la suite des choses donnent!

Lundi, je pars pour Anse à Pitre, à la frontière au sud du pays pour 3 jours. Saint-Pierre BEAUBRUN, s'y rend en effet pour essayer de récolter des informations pour récupérer des actes d'état civil pour des victimes de violence à la frontière qui ont porté plainte à la Cour interaméricaine des droits de l'Homme. Ce recours est supporté par le GARR, mais il est nécessaire que ces personnes se dotent d'un état civil pour continuer leur procédure. Je vais accompagner Saint-Pierre car cela va me permettre de me rendre compte du travail de terrain, de questionnement des gens et des techniques d'interrogations pour récupérer les informations essentielles au recouvrement d'un état civil.

Voilà, un message assez sérieux aujourd'hui, mais il faut bien commencer à travailler un jour! J'espère ne pas avoir été trop technique pour les non-initiés!

Port-au-Prince, 1:53 PM

1 commentaire:

  1. beaucoup de travail en perspective mais cela semble avancer un peu,bon courage pour c e boulot de titan mais tu vas y arriver. Bonne dégustation des produits français qui vont te changer de ta bouillie à la banane. Bisous mum

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